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"Mademoiselle", ou l'âge des femmes

 Longtemps, j'ai tourné autour du terme "mademoiselle". En parler dans le blog, ou pas ? Jusqu'au jour où je suis tombée s...

Lieux d'accueil pour hommes battus...à l'étranger



Dans de précédents articles, je me suis risquée à mettre les pieds dans le plat :
(Presque) tout le monde confond violences conjugales et violences faites aux femmes. Et (presque) tout le monde se trompe.
Ou s'en fiche. Ou ne veut pas savoir.
Il n'empêche : environ un quart des victimes de ces violences (psychologiques/physiques) sont masculines.
Ce n'est pas moi qui le dit.
Mais des grosses machines officielles genre INSEE ou Observatoire National de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Sans oublier le Haut Conseil à l'égalité hommes-femmes...

Un quart, ce n'est pas une minorité négligeable.
Mais négligée.
Des lieux d'accueil, de consultation ? Des refuges ? Où donc ?


Lieux d'accueil pour les victimes masculines de violences conjugales: le grand désert français...

 


En matière de violences conjugales, dans notre pays, des structures d'hébergements prennent en charge des hommes. Par exemple à Arras, Besançon, Rennes, Rouen.
A qui s'adressent ces dispositifs ? Aux auteurs de violence conjugale. Aux hommes agresseurs.
Ces centres sont d'ailleurs efficaces et nécessaires, en particulier pour prévenir les récidives. Les pouvoirs publics envisagent leur développement.

Et les hommes victimes ?
Ne vous fatiguez pas à chercher des dispositifs pour leur accueil en France.
Vous pouvez arpenter les moteurs de recherche de long en large, de bas en haut, en commençant par le plus célèbre d'entre eux.
Rien A Signaler.


A l'exception peut-être d'un accueil de jour à Alençon, destiné à aider les victimes de violences conjugales dans leurs démarches administratives. Présenté comme s'adressant à toutes victimes, femmes ou hommes, sa responsable mentionne toutefois uniquement des femmes parmi les bénéficiaires.


Vous sortez du cadre "femme agressée par son compagnon" et vous affirmez avoir subi des violences conjugales  ?
Vous êtes sûr(e) d'être une vraie victime ?
En toute hypothèse, restez dans votre doux foyer, ou retournez-y, ou débrouillez-vous.

Pourquoi donc gaspiller les précieux fonds public/associatifs pour :
- des mecs, ils peuvent se défendre
- des mecs, ces oppresseurs machistes
- des homos, ces marginaux
- une poignée de victimes minoritaires
- fragiliser la cause essentielle des violences (systémiques) faites aux femmes.

Tout va bien alors, surtout ne changeons rien.
Tout est bien rangé, étiqueté, classé.
Catégorie "hommes" : dans les tiroirs "oppresseurs", "agresseurs". Suivez les flèches.
L'Univers est clair, lisible. Reposant.

Et pourtant...
Je vous le donne en mille.
Hors de l'Hexagone, des centres d'accueil pour hommes victimes de violences conjugales existent, fonctionnent.
Vous avez bien lu : des structures d'accueil pour des victimes masculines. Ces créatures improbables.
Et où cela je vous prie ?

 ...tandis que d'autres pays commencent à prendre la mesure du problème


Commençons par l'Europe.
Divers pays commencent à voir apparaître des centres spécialisés dans la prise en charge d'hommes victimes de violences conjugales psychologiques/physiques.

En Allemagne : refuges dénommés Männehäuser,
En Belgique : refuge de Malines en Flandres, deux maisons  d'accueil à Bruxelles, MAJ : centre d'écoute à Liège.
Au Danemark : des structures dédiées aux hommes,
Au Luxembourg : centre "infoMann" (information, consultation et assistance pour hommes et garçons en détresse),
En Norvège : un centre de soutien psychologique et de conseils,
Au Royaume-Uni plusieurs centres d'accueil à Londres,
En Suisse, des foyers pour hommes battus, ainsi que l'association Pharos à Genève.

Traversons à présent l'Atlantique.

Au Canada, le Service d'Aide aux Conjoints - créé dès 1986 - s'adresse aux hommes en difficulté conjugale, notamment pour cause de violence de leur conjoint(e), de même que l'organisme Entraide pour hommes,
Aux Etats-Unis, l'association Family Violence Prevention a ouvert en 2016 dans l'Arkansas un refuge réservé aux  victimes masculines de violence domestique. L'association The Family Place en a ouvert un autre au Texas.


Par ailleurs, une association suisse  (Face à Face) travaille sur la prévention, l'information et l'éducation des femmes violentes, notamment à l'égard de leur conjoint.
Vous avez bien lu : des femmes violentes.
Stupéfiant ?
Il serait temps de se réveiller ! La violence des femmes, êtres humains à part entière, est une réalité.

Vous n'êtes pas au bout de vos surprises.
En Suisse encore, certains refuges destinés aux hommes travaillent en partenariat avec des lieux d'accueil destinés aux femmes.
Mieux (ou pire ?), en Belgique, un dispositif d'hébergement pour victimes de violences conjugales accueille des groupes mixtes.
Vous avez bien lu : mixtes. Des victimes des deux sexes accueillis dans un même lieu.
Certes, une prise en charge spécifique, par genre, peut sembler préférable pour éviter des réactions de rejet et de crainte, en particulier des femmes violentées vis-à-vis des hommes.
Cependant, ces structures mixtes peuvent fournir l'occasion de réduire peur et haine, de démythifier la figure masculine dominatrice et violente, de montrer qu'un homme peut aussi subir des violences.



Les femmes constituent les victimes majoritaires des violences conjugales et il demeure indispensable de lutter contre ce fléau, par tous les moyens possibles, y compris par des dispositifs d'écoute, d'accueil et d'hébergement.

Pour autant, cette lutte nécessaire serait-elle plus efficace en persistant à délaisser, mépriser, négliger les victimes masculines de violences domestiques ?
Un tel abandon serait-il doté d'un effet magique ?
Transformer les hommes violents en agneaux ?
Leur faire respecter les femmes ?
Faire disparaître le machisme ?

A moins qu'ignorer les victimes masculines - et la violence féminine - conduise en réalité à ce triste résultat :
Perpétuer l'identification du genre masculin à la domination, à l'agression, du genre féminin à la faiblesse. Le stéréotype du sexe fort et du sexe faible.
Tout le monde y perdra. Y perd déjà.





4 commentaires:

  1. Tu prêches à convaincue, mais merci pour cet article et ses références détaillées qui donnent de bons arguments!

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    1. Merci à toi pour ta lecture et ton commentaire.
      J'essaie d'être convaincante et crédible, ce qui passe obligatoirement par des sources détaillées...

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  2. Très bon résumé de la situation. On peut remarquer qu'en effet à l'étranger, notamment depuis 2-3 ans, ces structures se développent, tandis qu'ici, ça continue à faire la sourde oreille.
    Il faut espérer qu'à force de recherches et de travail professionnel, la cause des minorités émerge peu à peu.
    Continuer à parler de "histoires individuelles" ou de les nier car "non systémiques" est d'une grande violence, et ça ne peut plus continuer ainsi.
    Ca prendra du temps mais il faudra espérer que tôt ou tard ça arrive en France aussi...

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  3. Oui, il faut espérer que l'omerta cesse autour de ces victimes minoritaires, tandis qu'elle ne profite même pas aux victimes majoritaires (les femmes)..
    Un hebdomadaire généraliste vient de publier un article sur la question des hommes victimes de violences conjugales
    https://www.lexpress.fr/actualite/societe/le-fleau-des-violences-conjugales_1189658.html
    De temps en temps, le sujet émerge donc. Il faudrait que cela se produise plus souvent, et plus régulièrement..

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