De nombreuses professions longtemps déclinées au masculin prennent du galon, je veux dire du féminin.
Réjouissance (presque) générale.
Pendant ce temps, d'autres noms de métiers égarent leur masculin.
Indifférence générale.
Les noms de métiers au féminin, l'égalité entre les sexes progresse
Fin février 2019, l'Académie française a donné son feu vert !
"Pas trop tôt", ont ironisé certains (et certaines, bien sûr, où avais-je la tête...).
La vénérable institution ayant validé la féminisation des noms de métiers et professions, nous obtiendrons par exemple :
Artisane, croupière, maçonne, carreleuse, vigneronne, plombière, mécanicienne, professeure.
En douceur et sans autoritarisme, les modifications s'appuieront sur usages et pratiques.
Enfin, nous allons revenir à une évolution naturelle de la langue,
Passer du XIXe au XXIe siècle,
Lutter contre les discriminations,
Nous adapter à l'arrivée des femmes dans des professions autrefois masculines,
Ouvrir la société aux questions d'égalité dans la langue française.
En voilà un grand bol d'air, un beau programme.
Rappelez-vous, le monde du travail est un monde pour les hommes et pour les femmes
Je suis bien d'accord.
C'est pourquoi je m'interroge.
Où sont passés les infirmiers ?
Des noms de métiers perdent leur masculin, l'égalité des sexes régresse
Le monde du travail, pour les femmes et pour les hommes ?
Oui mais pas dans celui des soins infirmiers semble-t-il.
Inutile pour l'Académie française d'y mettre son grain de sel : la langue française accepte sans problème le terme "infirmière".
Avec tant de zèle que les "infirmiers" disparaissent.
Le 4 juin dernier, à la radio (France Inter), la ministre (ministresse ?) de la Santé nous a annoncé cette bonne nouvelle : ce métier "mène à énormément de carrières différentes".
Puis madame la ministre nous a précisé lesquelles :
"les infirmières libérales", "les infirmières de pratique avancée", "les infirmières de coordination", "les infirmières de PMI". C'est varié en effet. D'une grande diversité.
Quant à ce syndicat professionnel, pourtant dénommé "des Infirmier(e)s Conseiller(e)s de Santé", il nous détaille les missions des... infirmières.
Vous avez sans doute entendu parler de la crise du métier, les médias nous informent
que les infirmières libérales sont au bout du rouleau, d'une grève des infirmières, d'une réquisition de médecins et d'infirmières, du soutien d'une artiste aux infirmières en grève.
Le saviez-vous ?
Le 12 mai est la journée internationale de l'IDE, le plus souvent présentée comme la journée internationale des infirmières, y compris par les syndicats professionnels et les médias spécialisés dans l'information.
Bref, sous l'effet des "usages et pratiques", le terme "infirmier" s'efface en douceur.
Oui mais, pourrait-on objecter, le métier compte près de 90 % de femmes. Abattons l'usage dominant du masculin.
D'autant plus que mettre tout le monde au féminin promettrait un avenir radieux.
Abattons donc.
Pourtant, pourtant, j'avais cru comprendre que "l'évolution naturelle de la langue" pouvait renforcer l'idée que le monde du travail est "pour les hommes et pour les femmes", sensibiliser la société aux "questions d'égalité", accompagner la lutte "contre les discriminations".
Oublier, négliger, dénier les "infirmiers" parmi les "infirmières" est un excellent moyen de renforcer lesdites "discriminations", que nourrissent les stéréotypes de genre, clichés, préjugés.
C'est bien connu, les femmes sont douces, empathiques, dévouées. Parfaites pour être infirmières.
Prendre soin des autres est une vocation féminine. Et l'exercer dans des professions peu rémunérées et valorisées.
Faut-il appeler l'Académie française à la rescousse ?
Pour sauver le masculin de "l'infirmière" ?
Et celui de la "puéricultrice" ? De "l'assistante sociale" ? De "l'assistante maternelle" ?
Autrement dit, pour aider notre langue à lutter "contre les discriminations" ?
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